Génocide au Guatemala – 80 ans de prison pour l'ex-dictateur

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Génocide au Guatemala80 ans de prison pour l'ex-dictateur

Une juridiction guatémaltèque a déclaré vendredi Ríos Montt coupable de génocide et crimes contre l'humanité au cours de la guerre civile qui a ensanglanté le pays d'Amérique centrale.

Ríos Montt est le premier président sud-américain condamné pour génocide.(photo: Keystone)

Ríos Montt est le premier président sud-américain condamné pour génocide.(photo: Keystone)

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Les charges de génocide lui ont valu une peine de 50 ans et celles de crimes contre l'humanité une autre de 30 ans. La juge a également demandé la révocation de son placement en résidence surveillée depuis début 2012 et son incarcération.

«Je suis innocent», a-t-il déclaré à la cour. «Je n'ai jamais eu l'intention de détruire quelque ethnie que ce soit. Je n'a jamais ordonné de génocide», a-t-il ajouté. Efraín Rios Montt a qualifié sa condamnation de «show politique international». Il a annoncé qu'il allait faire appel de ce verdict. Celui-ci a en revanche été accueilli par des cris de joie et des applaudissements des proches des victimes des massacres dans la salle la Cour suprême de justice.

Plus de 1700 indigènes tués

Au pouvoir en 1982 et 1983, Rios Montt est accusé d'être impliqué dans l'assassinat de plus de 1700 indigènes lors d'une offensive de contre-insurrection, période particulièrement sanglante. L'accusation estimait que l'ancien chef d'Etat avait fermé les yeux sur des viols et de nombreux actes de torture auxquels a eu recours l'armée contre des insurgés et des populations indigènes, lors de cette offensive dite de la «terre brûlée» qui a fait 1771 morts dans la tribu maya des Ixils.

Protégé par son immunité parlementaire, Efrain Rios Montt a échappé à la justice pendant plus de trente ans avant de quitter le parlement en 2012. Le tribunal s'était retiré vendredi matin pour délibérer sur la culpabilité de l'ex-dictateur après l'ultime déposition du co-accusé de M. Montt, l'ancien chef du renseignement José Mauricio Rodriguez.

Guatémaltèques divisés

«Au cours des débats, il n'a été présenté aucun document indiquant : Mauricio Rodriguez a demandé de tuer untel (...), a demandé de brûler une maison ou a commis telle aberration», a plaidé l'ancien général Rodriguez dans sa dernière déclaration. Sous l'autorité de l'ex dictateur, arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en 1982 et délogé de la même façon l'année suivante, l'armée a appliqué la politique de «la terre brûlée» à l'encontre de communauté indiennes soupçonnées de soutenir les guérillas de gauche, en pleine guerre froide.

La guerre civile au Guatemala (1960-1996), a fait 200 000 morts et disparus, selon les Nations unies. Au cours du procès, plus d'une centaine de survivants sont venus raconter les atrocités commises par les militaires. Les visages masqués par des tissus colorés, des femmes indigènes ont notamment rapporté des viols collectifs. Le magistrat chargé de l'accusation, Orlando Lopez, a requis 75 ans de réclusion à l'encontre de MM. Rios Montt et Rodriguez, bien que la peine maximale au Guatemala soit de 50 ans.

Les avocats de la défense estiment pour leur part que le procès est illégal et exigent son annulation pour vice de procédure, avec un retour à la phase d'enquête initiale. Ce procès a divisé les quelque 14 millions de Guatémaltèques. Certains affirment qu'il y a eu des violations des droits humains mais pas de génocide. Parmi eux figurent le président actuel, l'ancien général Otto Pérez (droite). D'autres soutiennent que des rapports de l'ONU et de l’Église confirment qu'un génocide a été perpétré.

(L'essentiel Online/ats)

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