Réchauffement climatique – A quoi ressemblera un vin de Bordeaux en 2050?

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Réchauffement climatiqueÀ quoi ressemblera un vin de Bordeaux en 2050?

Si le sud-ouest de la France finit par connaître un climat espagnol, le célèbre vin bordelais aura un tout autre goût selon un viticulteur qui a fait des essais.

L'expérience vise à alerter l’opinion publique sur les conséquences du réchauffement climatique.

L'expérience vise à alerter l’opinion publique sur les conséquences du réchauffement climatique.

AFP/Mehdi Fedouach

Un viticulteur girondin s'est attelé à concocter une «cuvée du futur», «buvable» mais éloignée des crus bordelais d'aujourd'hui. «J'ai assemblé des vins rouges issus des deux cépages typiques» de la région, merlot et cabernet sauvignon, mais produits bien plus au sud, en Tunisie et dans le Minervois, en Languedoc-Roussillon, explique Pascal Chatonnet, oenologue et responsable du Château Haut-Chaigneau, à Néac (Gironde). Il dit avoir pris «la fourchette haute» des prévisions de réchauffement climatique, se basant sur l'hypothèse selon laquelle «il y aura le climat de Tolède à Bordeaux en 2050».

Son breuvage, présenté cette semaine à Paris, se limite à 13,5% d'alcool. Plus, ce serait «caricatural», sachant qu'on n'ira guère au-delà «parce que le marché n'en veut pas». Verdict du palais de l'experte Monique Josse, du musée du Vin à Paris, et Bordelaise: «Ce n'est pas ce que je connais depuis ma tendre enfance!» «À l'aveugle, j'aurais dit un Languedoc, mais basique (...) On n'a pas le terroir, le sol et le sous-sol, qui font une grosse partie du vin. C'est buvable, mais il y a un manque de finesse, d'authenticité».

Un goût plus sec et amer

Alors quel sera plutôt, selon elle, le goût du Bordeaux millésime 2050? «Et bien... je ne sais pas. C'est trop difficile de se projeter», il y a trop d'inconnues. Une température mondiale accrue de 2°C et plus serait la promesse d'un goût trop mûr, appauvri; les sécheresses celle d'un goût plus sec et amer, analysent les experts. Conclusion de Pascal Chatonnet: «Si on voulait maintenir des vins de bonne facture avec le climat de 2050, on ne pourrait plus cultiver les mêmes variétés» de vigne.

Depuis plusieurs années déjà, à Bordeaux comme partout en France, la profession fourbit ses armes, avec l'aide de la science, pour que les jus puissent à l'avenir garder leur typicité. Par exemple avec la «parcelle 52», où depuis 2009, au cœur de l'AOC Graves, les chercheurs testent 52 cépages du monde pour voir lesquels correspondraient le mieux au caractère des cépages bordelais. Au centre des préoccupations, la vulnérabilité du merlot, cépage le plus répandu dans le bordelais, à la maturation précoce, qui risque d'être abandonné.

En attendant, les initiateurs du cru 2050 veulent d'abord sensibiliser l'opinion. «Ce pari vise à faire comprendre que rien ne sera plus pareil, que tout va très vite», souligne Yves Leers, journaliste et auteur spécialiste de l'environnement. La première chose à faire est de «se convaincre de la réalité du changement climatique», ajoute-t-il, insistant sur l'enjeu économique: le secteur viti-vinicole représente en France le deuxième poste à l'exportation après l'aéronautique.

(L'essentiel/afp)

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