MarqueAdidas, en crise, se donne un an avant de repartir de l'avant
Le nouveau patron d'Adidas, Bjorn Gulden, aura fort à faire en 2023 après une année de marasme pour la marque aux trois bandes.

Solder la rupture avec le rappeur américain Kanye West, remettre la Chine en ordre de marche et écouler partout des stocks surabondants: le nouveau patron d'Adidas Bjorn Gulden aura fort à faire en 2023 après une année de marasme pour la marque aux trois bandes. «2023 sera une année de transition» pour commencer à «bâtir un modèle profitable à partir de 2024», année olympique, a déclaré Bjorn Gulden dans un communiqué publié mercredi.
Ce document a confirmé par ailleurs le recul sur un an de 83% du bénéfice net en 2022, à 254 millions d'euros, comme annoncé dès février. Le dernier trimestre a en particulier été douloureux avec une perte nette de 482 millions d'euros, conséquence de l'arrêt en octobre des ventes des baskets «Yeezy» liées au rappeur américain, engendrant 600 millions d'euros de ventes perdues.
«Tour pour réussir»
Adidas a néanmoins «tout pour réussir», est convaincu le patron danois arrivé en janvier à la tête de l'entreprise bavaroise, pour redorer le blason de la marque aux trois bandes en plein marasme. Il venait alors tout juste de quitter le rival voisin Puma, qu'il a dirigé depuis 2013. Il s'agit désormais de se concentrer sur ce qui fait le cœur de métier: «les produits, clients, partenaires distributeurs et sportifs», énumère-t-il.
Pour l'exercice écoulé, les actionnaires ne recevront eux qu'un dividende de 0,70 euro, contre 3,30 euros il y a un an. A la Bourse de Francfort, l'action Adidas perd plus d'1% en matinée.
Sort des Yeezy
Adidas a mis fin à sa très juteuse collaboration avec Kanye West -- connu sous le nom de Ye -- après des propos antisémites tenus par le rappeur. Conséquence directe, la collection «Yeezy» conçue avec West s'est arrêtée et des millions de paires de baskets dorment depuis sur des étagères bien gardées, en attendant d'être bradées un jour... ou simplement détruites. La marque aux trois bandes continue «d'évaluer diverses options pour l'utilisation future de son inventaire de produits Yeezy», selon un communiqué de l'entreprise.
Le manque à gagner pourrait aller jusqu'à environ 1,2 milliard d'euros en termes de ventes en 2023 s'il était décidé de ne pas écouler le stock, selon Adidas. Selon le scénario qui va s'imposer, le groupe s'attend in fine à afficher en 2023 au mieux un résultat d'exploitation nul et au pire un solde négatif de 700 millions d'euros, comme déjà indiqué en février. Cet agrégat est ressorti à 669 millions d'euros l'an dernier, en recul de 66%.
La Chine cale
Outre le partenariat rompu avec Yeezy, l'autre fardeau de l'équipementier sportif bavarois est lié à son activité déprimée en Chine. Les ventes sur ce marché jadis locomotive du groupe ont chuté en 2022 d'environ 36% à taux de change constants, à 3,2 milliards d'euros. Le recul est même de près de moitié au dernier trimestre. Ses activités en Chine ont pâti des blocages sanitaires stricts et d'un boycott des consommateurs après l'appel du groupe en 2020, avec d'autres marques, à ne pas acheter de coton du Xinjiang sur fond d'allégations de travail forcé de Ouïghours.
En Europe et en Amérique du Nord, c'est l'inflation record qui a retenu les acheteurs. Conséquence, les stocks ont augmenté globalement de 50% sur un an, à près de 6 milliards d'euros, et il s'agit de les faire fondre. M. Gulden veut refaire d'Adidas ni plus ni moins "la meilleure marque d'articles de sport au monde", déclare-t-il dans le communiqué. Son prédécesseur, le danois Kasper Rorsted, a été remercié en novembre dernier.
En pleine crise du Covid en 2021, il avait défini des objectifs stratégiques ambitieux pour la marque d'ici 2025, que M.Gulden va probablement devoir redéfinir. En compensation de son départ prématuré, M.Rorsted a touché une indemnité de 12 millions d’euros, selon le rapport annuel publié mercredi.