Turquie/SyrieAnkara est prête à lancer une offensive en Syrie
Ankara affirme être prête à lancer une opération contre les milices kurdes, tandis que la position des États-Unis apparaît discordante.

Des forces de l'Armée syrienne libre, soutenues par la Turquie, défilent lors d'un entraînement militaire en prévision d'une incursion turque.
La Turquie a affirmé mardi être prête à lancer une nouvelle offensive en Syrie contre une milice kurde soutenue par Washington, malgré l'envoi de signaux contradictoires par Donald Trump. Ils alimentent la confusion sur la position américaine.
«Tous les préparatifs en vue d'une opération ont été achevés», a indiqué mardi, le ministère turc de la Défense, renforçant l'impression qu'une offensive d'Ankara contre les Unités de protection du peuple (YPG) était imminente.
La tension dans le nord-est de la Syrie, vive depuis plusieurs mois, est encore montée d'un cran après l'annonce par la Maison-Blanche, dimanche soir, que les militaires américains stationnés dans la zone seraient retirés en vue d'une opération turque. Mais, accusé, jusque dans son propre camp, de lâcher des alliés des États-Unis, le président Trump a réorienté lundi son discours en affirmant qu'il «anéantirait complètement l'économie de la Turquie» si celle-ci «dépassait les bornes».
Balayant ces avertissements, le vice-président turc, Fuat Oktay, a déclaré mardi que la Turquie n'était «pas un pays qui agit en fonction des menaces». «Lorsqu'il s'agit de sa sécurité (...), la Turquie trace sa propre voie», a-t-il ajouté. D'après le quotidien turc Hürriyet, une opération pourrait débuter dans les prochains jours, l'état-major turc attendant que le retrait des forces américaines présentes dans cette zone soit achevé.
Zone tampon
La Turquie envisage dans un premier temps de prendre le contrôle d'une bande de territoire longue de 120 km et profonde d'une trentaine de km allant des villes de Tal Abyad à Ras al-Aïn, selon Hürriyet. Lundi soir, l'armée turque a dépêché des renforts, notamment des chars, en plusieurs points de sa frontière avec la Syrie.
À terme, Ankara entend créer une «zone de sécurité», sorte de tampon de 30 km de profondeur s'étirant de l'Euphrate à la frontière irakienne, soit 480 km. Cette zone a pour vocation, selon Ankara, d'accueillir une partie des 3,6 millions de Syriens réfugiés en Turquie et de séparer la frontière turque des territoires conquis par les YPG en plein chaos syrien.
«Terroristes»
Car si les pays occidentaux sont reconnaissants envers les YPG pour leur rôle de premier plan dans la défaite militaire du groupe État islamique (EI) en Syrie, Ankara les considère comme des «terroristes» en raison de leurs liens avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui mène une guérilla en Turquie.
En août, la Turquie et les États-Unis, deux alliés au sein de l'OTAN, s'étaient mis d'accord pour créer ensemble cette «zone de sécurité». Mais Ankara n'avait eu de cesse depuis de dénoncer des retards, menaçant de passer unilatéralement à l'action.
Inquiétude de la communauté internationale
Reste que cette confusion inquiète le reste de la communauté internationale, l'ONU indiquant lundi se «préparer au pire» en cas de nouvelle crise humanitaire en Syrie, où le conflit a fait depuis 2011 des millions de déplacés et a coûté la vie à plus de 370 000 personnes.
«Nous sommes en train de quitter la Syrie, mais nous n'avons absolument pas abandonné les Kurdes qui sont des gens formidables et de merveilleux combattants», a-t-il renchéri mardi dans un tweet. «Nous aidons les Kurdes financièrement (et en leur fournissant des) armes». Mais il a aussi souligné que la Turquie était un «partenaire commercial important» des Etats-Unis et annoncé qu'il accueillerait M. Erdogan à Washington le 13 novembre.
Accusé de «détruire la confiance»
Un autre sujet d'inquiétude en cas d'offensive turque concerne le sort des jihadistes, notamment européens, prisonniers des forces kurdes. Ces dernières ont accusé Washington de «détruire la confiance», et averti qu'une opération turque entraînerait un retour de l'EI.
Téhéran, acteur majeur du conflit syrien et soutien du régime de Damas, a aussi dit son opposition, le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif appelant au «respect de l'intégrité territoriale», lors d'un entretien avec son homologue turc, lundi soir.
(L'essentiel/afp)