Nous vous avons posé la questionCongé menstruel au Luxembourg: une avancée vers l'égalité des droits, vraiment?
En février dernier, l'Espagne a adopté une loi créant un congé menstruel, une première en Europe. Une telle initiative est-elle possible au Luxembourg? Nos lecteurs sont mitigés sur la question.

La ministre de l'Égalité Irene Montero, devant le parlement espagnol.
«C'est un jour historique pour les avancées féministes». L'Espagne est le premier pays en Europe et l'un des rares dans le monde à avoir intégré, en février, un congé menstruel à sa législation. Avec cette loi, «l'arrêt de travail d'une femme en cas de règles incapacitantes» liées, par exemple, «à des pathologies comme l'endométriose» sera «reconnu comme une situation spéciale d'incapacité temporaire» de travail.
Une telle initiative avait déjà été proposée au Grand-Duché, en mai 2021, par le biais d'une pétition réclamant deux jours de dispense pour les femmes ayant des règles douloureuses. Avec près de 5 000 signatures, cette pétition a été débattue à la Chambre des députés, mais n'a pas été plus loin.
«Les premiers jours, je suis pliée en deux tellement j'ai mal»
Sollicités par L'essentiel, nos lecteurs se sont montrés majoritairement réticents quant à la question d'un congé menstruel à l'échelle nationale, malgré quelques avis positifs: «Je parle dans mon cas, je trouve que c'est une bonne idée. Chez moi, c'est une catastrophe les premiers jours, je suis pliée en deux tellement j'ai mal», commente Silvia sur notre page Instagram. Une opinion partagée par Caro, qui regrette qu'une telle initiative n'existait pas à l'âge où elle a commencé à travailler: «Je souffre d'endométriose et à l'époque j'avais des migraines incessantes. Je prenais souvent congé… Bravo à l'Espagne, sacrée avancée pour les femmes!».
Une «avancée» pourtant décriée par une grande partie de nos lecteurs, qui craignent plutôt l'effet inverse en termes d'égalité des droits, notamment au niveau du marché du travail. «Je ne vois pas en quoi cette loi est égalitaire, que du contraire!» commente un lecteur sur notre site. «Je comprends le fond du problème, certes, mais ce sera un frein à l'embauche des femmes». Pour Jeanne, qui dit avoir été à la tête d'une entreprise pendant dix ans, c'est tout bonnement «une raison de plus de discriminer les femmes pour l'emploi et les mettre au second plan sur leurs aptitudes à être présentes au boulot, comparé aux hommes», s'indigne-t-elle, craignant les abus d'une telle loi.
Daniel, employeur également, est du même avis: «Si dans une société, il y avait 30 femmes bénéficiant chacune de ce congé, j'aurais peur d'embaucher des femmes à l'avenir».
«Non, pas de retour en arrière!»
Sophie dénonce, sur notre page Facebook, une stigmatisation perpétuelle des femmes. «Personne n'a à justifier son arrêt maladie, mais les femmes, pour les règles, oui! Comme si ce n'était pas déjà assez dur comme ça. Non, pas de retour en arrière!».
Anik Raskin, chargée de direction du Conseil national des femmes du Luxembourg, ASBL, sollicitée par L'essentiel, confirme: «En tant que Conseil national des femmes, nous ne sommes absolument pas en faveur d'une telle mesure, parce que ça risque d'être un frein sur le marché du travail».
Pas de congé menstruel au Luxembourg donc, mais des solutions alternatives sont urgentes à trouver, notamment en termes de sensibilisation des employeurs et médecins aux douleurs et pathologies liées aux règles, qui dépendent de chaque femme et de chaque corps. «La douleur est subjective» affirme Elyess. «Pour celles atteintes d'endométriose ou de règles très douloureuses, c'est légitime» répond Btissam. «Ce qu'il faudrait réellement, c'est parler du pourquoi certaines femmes souffrent le martyre, et de rappeler que ce n'est pas normal de souffrir au point d'impacter nos activités professionnelles ou privées» conclut Alicia, rejointe par Catarina: «Je ne suis pas pour la dispense d'office, mais une solution est clairement à trouver».
Un congé menstruel au Luxembourg, bonne ou mauvaise idée?