Macron - Hollande«François va en balancer une, un de ces quatre»
Entre Emmanuel Macron et François Hollande, le torchon brûle. L'ancien locataire de l’Élysée est en colère après les tacles reçus lors de l'interview télévisée de dimanche.

Image issue de la passation de pouvoir le 8 mai 2017.
Budget «insincère» contre politique «brutale»: les couteaux sont tirés entre Emmanuel Macron et ses «prédécesseurs» socialistes, au premier chef François Hollande, qui n'hésitent plus à répliquer, y compris depuis l'étranger, aux mises en cause du chef de l'État. C'est sur le terrain fiscal que la brouille s'envenime, au moment où s'engage à l'Assemblée l'examen du premier budget du quinquennat Macron. Dimanche sur TF1, le chef de l'État a âprement défendu sa réforme de l'ISF, tentant de décoller cette étiquette de «président des riches» que lui attribue la gauche et brocardant les «jalousies» françaises envers les plus fortunés.
M. Macron a également critiqué à plusieurs reprises, sans jamais le nommer, la «présidence bavarde» et la politique fiscale de son «prédécesseur» dont il n'a jamais cité le nom dimanche soir, dont la taxe à 75%. La réplique ne s'est pas fait attendre. «Si dans un pays l'idée s'installe qu'il y a une fiscalité allégée pour les riches et alourdie pour les plus modestes ou les classes moyennes, alors c'est la capacité qu'il a à se mobiliser pour son avenir qui se trouve mise en cause», a lancé François Hollande, depuis Séoul, où il donnait une conférence.
«François est très en colère»
Autre pique, cette fois devant les caméras de TF1, contre la suppression au cours de l'été de nombreux emplois aidés, «une politique brutale», un «coup porté aux associations» et «à des personnes qui étaient dans la perspective» d'un emploi, a asséné l'ancien locataire de l’Élysée.
Dans Le Parisien, des proches de l'ancien chef de l'État se lâchent. «Trop, c'est trop: François est très en colère», raconte un premier tandis qu'un autre menace: «François va en balancer une, un de ces quatre». Selon eux, il trouve Emmanuel Macron «rancunier, immature et malhabile».
«Dédain vulgaire» et «mépris hautain»
Désormais collaborateur de François Hollande, l'ex-ministre des Finances, Michel Sapin, a pris le relais, dénonçant dans une tribune au Monde un budget «à rebours de notre histoire», une «faute morale» qui «contredit les grands principes républicains de progressivité de l'impôt». Et l'ancien collègue de M. Macron à Bercy de dénoncer le «dédain vulgaire» et le «mépris hautain» de l'actuelle majorité et de son premier représentant à l'Élysée.
Piquée au vif, la députée LREM, Aurore Bergé, a dénoncé en François Hollande un «président qui s'exprime pour critiquer son pays depuis l'étranger», oubliant les «cyniques» et les «fainéants» fustigés par Emmanuel Macron depuis Athènes.
«Est-ce juste?»
Qu'elle semble loin la passation de pouvoir entre MM. Macron et Hollande, il y a tout juste cinq mois. Raccompagné jusqu'à sa voiture dans la cour de l'Élysée par son ex-collaborateur puis ministre de l'Économie, François Hollande avait alors lancé un «bon courage» à son successeur avant de quitter le palais.
Mais cette cordialité fut de courte durée. Au milieu du mois d'août, l'ex-président sortait de sa réserve pour critiquer les ordonnances à venir sur le droit du travail et exhorter M. Macron à ne «pas demander aux Français des sacrifices qui ne sont pas utiles». Réplique cinglante du président à son prédécesseur dans un entretien au Point: «Il serait étrange que l'impossibilité qui a été la sienne de défendre son bilan devant les Français puisse motiver une tentation, durant les années qui viennent, de le justifier devant les journalistes».
Début des hostilités en juin
Les hostilités avaient débuté fin juin avec la charge d'Édouard Philippe contre le budget «insincère» laissé par l'équipe précédente. Une attaque qui avait suscité de nombreuses réactions des ex-locataires de Bercy, M. Sapin et Christian Eckert, et de proches de M. Hollande comme Stéphane Le Foll, auxquels s'est ajouté, ces derniers jours, Bernard Cazeneuve.
«Lorsque l'on décide, alors qu'on a expliqué il y a trois mois à peine que la situation des finances publiques était épouvantable, de mettre en place 4,5 milliards d'allègements d'impôts sur les plus riches, est-ce juste?», a ainsi fait mine de s'interroger l'ancien Premier ministre. Non sans insister sur la «loyauté» non «négociable» en politique dont l'ex-ministre Macron aurait manqué en concourant à l'Élysée au détriment de celui qui l'avait nommé.
«L'insincérité, c'était du pipeau», relevait récemment un ministre du précédent quinquennat estimant que François Hollande «a besoin de la considération des Français et donc de son successeur». Emmanuel Macron n'a d'ailleurs jamais invité François Hollande et Julie Gayet à l'Élysée depuis qu'il a été élu alors que Nicolas Sarkozy et son épouse Carla Bruni ont eu, eux, les honneurs du Palais présidentiel pour un diner.
(L'essentiel/cga/afp)