Lutte contre les féminicides – L'Espagne, un modèle européen à suivre

Publié

Lutte contre les féminicidesL'Espagne, un modèle européen à suivre

Loi pionnière, tribunaux spécialisés et bracelets antirapprochement, l'Espagne a pris, dès le début des années 2000, le tournant de la lutte contre les assassinats de femmes.

 Au total depuis 2003, 1 021 femmes ont été tuées en Espagne.

Au total depuis 2003, 1 021 femmes ont été tuées en Espagne.

AFP/Gabriel Bouys

Une loi dès 2004

Dans un pays où le mouvement féministe, favorisé par l'ébullition de la société civile après la fin de la dictature franquiste, est très influent, ce texte affirme que «la violence de genre n'est pas un problème qui affecte la vie privée. Au contraire, il s'agit du symbole le plus brutal de l'inégalité existante dans notre société». Dans la foulée, une centaine de tribunaux et un parquet spécialisés sont créés.

Un budget d'un milliard d'euros

Selon le gouvernement, plus de 57 000 femmes bénéficient actuellement d'un suivi policier. Quelque 1 200 sont protégées par les bracelets électroniques posés sur leurs agresseurs, afin de vérifier qu'ils ne s'approchent pas à moins d'une certaine distance. Le pacte d'État sur la violence de genre approuvé en 2017 prévoit un budget d'un milliard d'euros sur cinq ans.

Médias engagés

Les statistiques officielles sur le nombre de femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint ont vu le jour en 2003. Très détaillées, elles sont régulièrement mises à jour sur Internet. Le chef du gouvernement actuel, Pedro Sanchez, tweete après chaque cas.

48 femmes ont été tuées en 2018 et 46 depuis début 2019. Les chiffres sont donc en nette baisse par rapport aux 71 de 2003. Au total depuis 2003, 1 021 femmes ont été tuées. Au fil des années, les médias ont changé leur manière de couvrir ces drames. «Avant, ils les présentaient comme des cas isolés, des faits divers. Puis ils ont décidé de surveiller ces crimes et de les présenter comme la manifestation d'un problème structurel», grâce à la sensibilisation des associations féministes, explique Marisa Soleto, directrice de l'ONG Fundacion Mujeres.

Une affaire emblématique fut celle d'Ana Orantes, brûlée vive en 1997 par son mari, après avoir dénoncé à la télévision les violences qu'elle subissait depuis quarante ans. Aujourd'hui, les médias font régulièrement leur une sur les féminicides.

Rupture du consensus par l'extrême droite

En outre, certaines n'obtiennent pas de protection malgré le dépôt d'une plainte, dénoncent les féministes qui plaident aussi pour le renforcement de l'éducation, de nombreux cas de violences se produisant chez les jeunes.

Les associations regrettent un nombre de victimes encore trop élevé et craignent un recul de la cause alors que l'extrême droite a rompu le consensus autour des violences sexistes. Le parti Vox, entré en force au Parlement, fin avril, demande ainsi l'abandon de certaines mesures de la loi de 2004, les jugeant «idéologiques» et «discriminatoires» envers les hommes.

(L'essentiel/afp)

Ton opinion