En cuisineLa Chine, nouvel eldorado du caviar
La Chine est le plus gros producteur mondial de caviar. Un produit de luxe qui s'impose sur les plus grandes tables.

Les œufs d'esturgeon sont récoltés avec soin.
Du caviar «made in China»? Si l’image du pays asiatique est ternie par les scandales alimentaires à répétition, ses œufs d’esturgeon, respectés des connaisseurs, s’imposent progressivement sur les tables de chefs étoilés. C’est sur le Qiandaohu (le Lac aux mille îles), à 300 km au sud-ouest de Shanghai, que Kaluga Queen a installé son élevage, dans un écrin aux eaux pures entouré de montagnes. Sur cette étendue grande comme le Léman, la marque chinoise, créée en 2005 sous l’impulsion d’experts du ministère de l’Agriculture, produit l’essentiel du caviar mondial (35%) et donc de Chine, faisant du pays le leader planétaire du secteur.
Kaluga Queen et ses 300 employés élèvent en permanence quelque 200 000 esturgeons. Arrivés à maturité sexuelle, les femelles sont éventrées vivantes dans un laboratoire ultramoderne où l’atmosphère est maintenue à 10 degrés. Une fois extraits, leurs œufs sont lavés, triés, tamisés, salés puis mis en boîtes.
86 tonnes en 2018
En 2018, Kaluga Queen a produit 86 tonnes de caviar: 82 sont parties à l’export, surtout vers l’Union européenne (50%), les États-Unis (20%) et la Russie (10%). En fonction des espèces, le prix du kilo varie entre 10 000 et 180 000 yuans (1 300 et 23 000 euros). Le poisson le plus cher a une valeur en caviar de deux millions de yuans (258 000 euros). «C’est le prix d’une Ferrari», fait remarquer en souriant Xia Yongtao, vice-président de l’entreprise.
Il mesure «le chemin parcouru» face au «manque de confiance» des clients depuis 2006, lorsque Kaluga Queen a produit son premier bocal. Car d’innombrables scandales alimentaires ont frappé la Chine ces 20 dernières années: lait en poudre contaminé, riz au cadmium, sauce soja à l’arsenic, huiles sales réutilisées par les restaurants...
Des clients prestigieux
Aujourd’hui, Kaluga Queen a un chiffre d’affaires annuel de 220 millions de yuans (28 millions d’euros) et compte parmi ses clients la compagnie aérienne Lufthansa ou encore le restaurant «L’Atelier de Joël Robuchon» à Shanghai (2 étoiles Michelin). D’innombrables distributeurs fournissent d’autres établissements prestigieux partout dans le monde. Un acheteur a même confié en avoir fait livrer... au dirigeant nord-coréen Kim Jong-un, affirme Xia Yongtao.
Le chef Guy Savoy, dont l’établissement parisien a été désigné «meilleur restaurant du monde» et a trois étoiles Michelin, utilise également du caviar chinois. «L’étiquette made in China n’a aucune importance. L’important, c’est surtout la qualité de l’élevage. Et ceux qui nous fournissent sont de qualité remarquable», explique M. Savoy, qui emploie cet «or noir» avec des ailes de raie et des Saint-Jacques. Bon appétit!
(L'essentiel)