Troubles à Hong KongLa presse chinoise diabolise les manifestants
En Chine, les médias d'État n'ont pas de mots assez durs pour qualifier les manifestants pro-démocratie de Hong Kong. Ils évitent le sujet ou mettent en avant les violences.

A molotov cocktail thrown by a protester burns next to a truck after the driver attempted to drive through a blocked road outside the Hong Kong Polytechnic University on November 14, 2019. - Pro-democracy protesters challenging China's rule of Hong Kong on November 14 choked the city for a fourth straight working day, firing arrows at police, barricading roads and disrupting transport links, as schools and businesses closed. (Photo by DALE DE LA REY / AFP)
«Émeutiers» plutôt que «manifestants pro-démocratie», «sauvages», «barbares», «terroristes»: Les médias contrôlés par Pékin n'ont pas de mots assez durs pour qualifier les contestataires qui défient le pouvoir pro-Pékin depuis début juin. Loin des revendications démocratiques des manifestants, les médias continentaux insistent sur les violences des militants radicaux, comme celui qui a aspergé d'essence un homme lundi avant de mettre le feu à ses vêtements. «La cruauté et la démence montrées par les émeutiers révèlent qu'ils sont devenus des fous assoiffés de sang», dénonce vendredi le quotidien de langue anglaise China Daily.
«La violence à Hong Kong a pris de l'ampleur et devient une manifestation de l'extrême droite contre la démocratie, la liberté et les droits de l'homme», estimait jeudi le Quotidien du Peuple, principal organe du Parti communiste au pouvoir. Via les médias, l'objectif du régime communiste est de mettre en garde sa propre population contre la tentation d'imiter les manifestants hongkongais, estime le sinologue Michel Bonnin, de l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris. Comme souvent, il a caché la situation tant qu'il a pu, puis quand ce n'était plus possible, il a démonisé le mouvement, en prétendant ne voir que des émeutiers indépendantistes manipulés par les forces hostiles étrangères».
Mise en exergue des manifestations pro-Pékin
La couverture des troubles occulte les centaines de milliers de manifestants pacifiques pour se concentrer sur les violences des plus radicaux. Le coup de feu tiré lundi par un policier sur un contestataire est justifié ainsi par le Global Times: «attaquer et menacer la police dans l'exercice du maintien de l'ordre est lourd de risques, y compris celui d'être abattu sur le champ». Si les médias dénoncent les violences, ces dernières sont paradoxalement absentes en images, que ce soit à la télévision ou dans les journaux. Explication: les menaces répétées du pouvoir n'ont aucun effet sur les manifestants qui continuent à défier Pékin, depuis cinq mois.
Les médias préfèrent se concentrer sur les actions des militants pro-Pékin. En juin, au lendemain d'une manifestation géante qui avait réuni deux millions de personnes selon les organisateurs, le China Daily préférait se faire l'écho, photo à l'appui, du rassemblement d'une centaine de sympathisants devant le consulat des États-Unis pour protester contre le soutien présumé de Washington aux contestataires. Les médias insistent sur les cas de la Libye et de la Syrie pour démontrer que ces révolutions dégénèrent en guerres civiles.
(L'essentiel/afp)