Le Grand-Duc Henri pourrait refuser de signer la loi sur l'euthanasie
C'est une première au Luxembourg. Le Grand-Duc pourrait empêcher la promulgation de la loi sur l'euthanasie, adoptée par le parlement en première lecture le 19 février.

C'est une première au Luxembourg. Jamais dans l'histoire du Grand-Duché, le souverain ne s'est opposé au vote des députés. (afp)
Une source parlementaire a confirmé que le Grand-Duc avait reçu lundi les dirigeants des groupes parlementaires pour les informer de son refus de signer cette loi. "Il s'agit d'une crise constitutionnelle grave", a estimé cette source.
Jamais dans l'histoire du Grand-Duché, le souverain ne s'est opposé au vote des députés luxembourgeois. Le projet de loi dépénalisant sous certaines conditions l'euthanasie doit être adopté définitivement en deuxième et dernière lecture ce mois-ci. Le texte original adopé le 19 février dernier a par ailleurs été modifié par le Conseil d'État pour des raisons purement juridiques. Le grand-duc doit ensuite le "sanctionner et le promulguer" par sa signature dans les trois mois.
Texte adopté à une courte majorité
Lors du vote en première lecture le 19 février, le texte avait été adopté à une courte majorité de 30 voix pour et 26 contre. Le texte avait pu passer in extremis grâce au soutien des députés socialistes de la majorité gouvernementale et des membres de l'opposition libérale et des Verts.
Et malgré l'opposition massive du parti des chrétiens-sociaux du Premier ministre Jean-Claude Juncker, qui avaient exprimé la crainte d'une "banalisation de l'acte d'euthanasie".
Il doit être neutre politiquement
En l'absence de décision officielle du grand-duc, le député François Bausch, président du groupe des Verts au parlement luxembourgeois, s'est dit déterminé à "mener le travail parlementaire jusqu'au bout".
"J'espère que le projet de loi passera le cap du parlement avant la fin de l'année. J'espère que le grand-duc respectera le consensus qui a toujours prévalu au Luxembourg", a-t-il indiqué. "Nous sommes une monarchie constitutionnelle".
"Le grand-duc doit être politiquement neutre. Sinon, cela mènera à un débat sérieux sur la Constitution", a-t-il ajouté. Introduite en 2001, ce projet de loi sur l'euthanasie a suscité des débats passionnés dans la population luxembourgeoise, très attachée aux valeurs du catholicisme. Le monde médical s'était majoritairement opposé à ce projet. Seuls les Pays-Bas et la Belgique ont légalisé l'euthanasie, tous les deux en 2002.
lessentiel.lu avec AFP
Précédent en Belgique
Dans la plupart des autres pays européens, l'aide apportée aux malades incurables désireux de mettre fin à leurs jours reste un homicide et l'opinion publique est divisée. Dans un cas similaire, le roi des Belges Baudouin Ier avait estimé en 1990 que sa "conscience lui interdisait de sanctionner" une loi libéralisant l'avortement.
Le gouvernement et le parlement belges avaient alors "constaté que le roi se trouvait dans l'impossibilité de régner" durant quelques jours et avait promulgué la loi sans signature royale. L'utilisation audacieuse d'une procédure prévue pour pallier une démence du souverain ou son emprisonnement en temps de guerre avait été très critiquée en Belgique et failli coûter sa couronne à Baudouin.