«Show me your voice»«Le terme "travelo" et les clichés, ça m'énerve»
Pour le candidat suisse Svenn, apparaître sur «M6» en drag-queen dans le premier numéro de «Show me your voice» était un acte militant. Il se confie.

Il a fait un passage remarqué dans le premier numéro de «Show Me Your Voice», sur M6, le 22 avril. En surprenant les deux candidates et le jury avec sa voix de contre-ténor, celui qui est aussi chanteur lyrique a montré que toutes les drag-queens n’utilisent pas le playback quand elles se produisent sur scène. Pour 20 minutes, Svenn a accepté de se transformer et de se confier.
Pourquoi avoir choisi de vous présenter sur M6 en tant que drag-queen?
Je m’y suis présenté sous mes deux étiquettes: celle de drag-queen et celle de chanteur. L’idée étant pour moi de faire le pont entre musique et drag-queen, entre le chant et la performance drag.
Qu’avez-vous pratiqué en premier: le chant lyrique ou la transformation en drag-queen?
Clairement, la pratique du chant lyrique est venue bien avant la transformation en drag-queen. C’est quelque chose qui nécessite beaucoup de travail et d’années de préparation.
Comment décririez-vous une performance de drag-queen à une personne qui ne sait pas ce que c’est?
Avec la popularisation du phénomène drag outre-Atlantique, il commence à y avoir des codes, mais je crois que chacun peut avoir sa façon de faire du drag: que ce soit par la danse, le chant en playback ou live, ou n'importe quelle autre discipline, comme le stand up. Le tout, je pense, c’est de se créer un alter ego couvert de fond de teint. C’est un art, il y a des techniques, un savoir, toute une culture derrière. Pour le grand public, une drag-queen, c’est quelqu’un qui se déguise. Je préfère l’appellation de costume. On incarne véritablement un personnage.
Quels sont les clichés sur les drag-queens qui vous énervent?
Ça commence par l’appellation «travelo» ou «travesti». Au-delà de ça, je ne sais pas s’il y a énormément de clichés. Je pense qu’il faut réussir à dépasser les commentaires peu sympathiques des gens. Je ne veux pas me faire le porte-parole d’une communauté, mais je pense qu’il y a un message à faire passer en apparaissant sur une chaîne tous publics comme M6 en prime time. Ce message, c’est: «On existe, on est là et on est visibles.» Je pense que c’est un petit acte militant que d’accepter d’être vu sous cette étiquette-là et de changer les mentalités, ou pas. En tout cas, de créer la réaction. Oui, il peut y avoir des commentaires négatifs, mais ils me glissent dessus comme de l’eau sur les plumes d’un canard.
Avez-vous un nom en tant que drag-queen?
J’en avais un, mais il était tellement au-dessous de la ceinture, que je me suis dit que c’était le moment de revoir ça (il rit). On m’a appelé Mitzy, mais maintenant j’ai une préférence pour qu’on m’appelle juste Svenn. Pour la simple et bonne raison qu’à partir du moment où on a envie de concilier plusieurs choses – comme je l’ai fait à l’écran, mais aussi dans ma vie – l’idée c’est de pouvoir réunir tout ça sous une identité qui n’a pas besoin de pseudonyme ou d’être cachée. Et je garde mon nom complet pour l’opéra et le travail.
(L'essentiel/Julienne Farine)