LuxembourgLes entreprises craignent une double indexation
LUXEMBOURG - Le Statec a confirmé qu'une indexation des salaires tombera avant l'été et peut-être une autre en fin d'année. Un défi pour beaucoup d'entreprises.

L'artisanat réunit 8 000 entreprises et 100 000 salariés au pays.
«Cela peut être une bonne nouvelle pour les salariés, mais pour les entreprises, avant tout pour les PME, c'est un vrai problème». Secrétaire général adjoint de la Fédération des artisans, Christian Reuter ne cachait pas mercredi une certaine inquiétude alors que le Statec a confirmé que deux indexations des salaires (de 2,5%) pourraient tomber en 2022, après celle d'octobre dernier. La première arriverait avant l'été, la seconde peut-être dès la fin d'année.
«On parle d'une augmentation salariale totale de plus de 5%. Pour une entreprise de vingt personnes, cela représente un salaire supplémentaire à payer chaque mois», assure-t-il. Seule option: trouver de nouveaux marchés. Mais «la situation est déjà assez tendue (...) Les autres pays ne connaissent pas l'indexation et cela peut nuire à notre compétitivité», ajoute Christian Reuter.
«Ça peut faire mal sur une année»
«Les salariés ont besoin d'argent. Si on voit les frais d'énergie, tous les patrons le comprennent. C'est un coût aussi pour les entreprises très impactées par le prix des carburants», assure Marc Thein, président du comité de direction de l'entreprise d'électricité et génie technique Socom.
S'il ne veut pas «semer la panique» et estime qu'une double indexation en 2022 ne causerait pas «une vague de faillites même si certaines entreprises ne vont pas encore encaisser ce coup-là», Marc Thein souligne que cela va être difficile, «un coup dur». Des coûts supplémentaires qui risquent d'être répercutés sinon sur les particuliers, sur les communes ou l'État pour les chantiers qui les concernent.
Pour Socom, qui réunit 700 salariés, «deux tranches d'index, c'est 1,8 million d'euros de dépenses en plus, sans savoir quelle part peut être refacturée à tel ou tel client. Donc difficile de chiffrer le montant des dépenses irrécupérables. C'est quand même plus de la moitié du bénéfice de la société pour l'année 2021», indique Marc Thein, qui rappelle que Socom avait déjà choisi d'accorder une prime unique de 150 euros à ses salariés pour l'énergie chère. «Un accord dont on est très fiers. C'est vraiment très dur pour les gens. On le sait. On voulait aider. Mais on nous annonce une deuxième tranche d'index et ça peut faire mal sur une année».
Lier évolution des salaires et prix de l'énergie?
Christian Reuter ne s'attend pas non plus à une «avalanche de faillites à cause de deux tranches indiciaires. Mais on sait que cela vient des coûts de l'énergie et qu'ils vont continuer à augmenter dans les années qui viennent. Si on se projette sur cinq ans, on ne peut pas avoir deux tranches indiciaires par année, à cause d'une hausse du coût de l'énergie. Cela, les entreprises ne pourront pas le gérer», ajoute-t-il.
Viendront les questions politiques. «Il y a quelques années, on avait parlé de limiter l'indexation à deux fois et demie le salaire minimum ou peut-être de limiter à une tranche par année», lâche le représentant de la Fédération des artisans qui conclut: «On ne sait pas si c'est la meilleure idée de lier l'évolution des salaires à celle du prix de l'énergie».
(Nicolas Martin et Joseph Gaulier/L'essentiel)
Les indexations ont déjà été bloquées
Lorsque plusieurs tranches indiciaires interviennent de façon rapprochée, certaines peuvent être gelées. Ainsi, en 2012, le gouvernement avait décidé de limiter à une indexation par an sur les années 2012, 2013 et 2014. Mais cette décision doit passer par une loi. Or, aucune discussion en ce sens n'a eu lieu pour le moment. De plus, «l'usage veut que tout ce qui touche à l'indexation des salaires soit négocié au sein d'une tripartite avec les syndicats et le patronat», indique un connaisseur du dossier.