Justice en France – Les sex toys sont-ils porno?

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Justice en FranceLes sex toys sont-ils porno?

Le tribunal correctionnel de Paris devra trancher. Il est saisi par des associations catholiques qui contestent l'installation d'un sex shop à moins de 200 mètres d'une école parisienne.

L'avocat du commerçant note que «ces objets sont en vente absolument libre», le catalogue des 3 Suisses par exemple y consacrant «des pages entières».

L'avocat du commerçant note que «ces objets sont en vente absolument libre», le catalogue des 3 Suisses par exemple y consacrant «des pages entières».

Ce procès va donner l'occasion à la justice française d'éclaircir un véritable flou juridique. Car si la loi sur la protection de l'enfance de 1987, réformée en 2007, interdit «l'installation à moins de 200 mètres d'un établissement d'enseignement, d'un établissement dont l'activité est la vente ou la mise à disposition du public d'objets à caractère pornographique», elle omet de définir ce qu'est un «objet pornographique».

Pour la Confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC) et l'association CLER Amour et Famille, le «Love shop» situé au 69 rue Saint-Martin à Paris, à 90 m de l'école élémentaire et du collège Saint-Merri, enfreint la loi. Et son gérant, Nicolas Busnel, est passible de deux ans de prison et 30 000 euros d'amende. Créée en 2004, l'enseigne «1969 - Curiosités désirables» propose dans ses boutiques huiles de massage, lingerie fine, godemichés, vibromasseurs et autres objets coquins.

«Simulation d'une fellation ou d'une masturbation»

Pour les familles catholiques, l'ambiance raffinée de ces sex shops d'un nouveau genre n'en gomme pas le caractère pornographique. «À mon sens, la pornographie est clairement définie dans la jurisprudence», estime leur avocat, Me Henri de Beauregard, invoquant une décision de 1972. Il avait alors été jugé qu'étaient «pornographiques», les œuvres qui, «décrivent seulement les mécanismes physiologiques» de l'acte sexuel, en omettant tout «contexte sentimental».

«Avec des objets dont l'essence même est la simulation d'une fellation ou d'une masturbation, on est purement dans le physiologique», considère l'avocat. «Si les sex toys ne sont pas considérés comme pornographiques, alors je ne vois pas ce qui est un objet pornographique!»

«Vendus tant chez des grands couturiers qu'en grande surface»

«Il y a autant de définitions possibles de la pornographie que d'individus», lui répond l'avocat de Nicolas Busnel, Me Richard Malka, parlant d'un des concepts «les plus indéfinissables qui soit». D'ailleurs, note-t-il, «ces objets sont en vente absolument libre», le catalogue des 3 Suisses par exemple y consacrant «des pages entières». «L'utilisation de sex toys n'induit en rien une quelconque dépravation générale, sauf à tomber dans une vision obscurantiste de la sexualité», met en garde l'avocat. Ces objets, qui «sont aujourd'hui vendus tant chez des grands couturiers qu'en grande surface» illustrent selon lui «une évolution de la société».

«Comment comprendre, s'indigne l'avocat, que des ouvrages représentant ou décrivant des scènes sexuelles parfois violentes soient autorisées à la vente aux mineurs alors que des objets ne représentant aucune scène sexuelle seraient décrétés pornographiques?»

Mercredi, le procès pourrait toutefois tourner court si le tribunal faisait droit à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par Me Malka. Ce dernier estime que la loi pour laquelle est jugé son client est anticonstitutionnelle car contraire à la liberté de commerce. En effet, relève-t-il, «il n'existe, hormis les cimetières et les parcs parisiens, aucun périmètre de 200 mètres dans lequel il n'y aurait pas un établissement d'enseignement». Par conséquent, «si la loi était interprétée comme le réclament les parties civiles, on devrait fermer tous les sex shops, mais aussi les Galeries Lafayette, le Printemps et les dépôts de la Redoute!»

(L'essentiel Online/AFP)

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