Élection du parlementLes Vénézuéliens aux urnes en pleine crise
Les Vénézuéliens, excédés par la crise économique qui a vidé les rayons des supermarchés, votaient dimanche pour renouveler leurs députés.

Nicola Maduro, successeur de Hugo Chavez, pourrait perdre la majorité au Parlement.
Avant même l'ouverture des bureaux de vote au Venezuela à 6h (11h30 au Luxembourg), de longues files d'attente se sont formées, 19,5 millions d'électeurs devant désigner les 167 membres du Parlement monocaméral. Les premiers résultats ne sont pas attendus avant 22h (lundi à 3h30 au Luxembourg). Après avoir répété qu'il «n'abandonner(ait) jamais la révolution», laissant craindre des violences, 18 mois après des manifestations ayant fait officiellement 43 morts, le président Nicolas Maduro a adouci son discours samedi, appelant à «voter en paix».
Mais le président Maduro, 53 ans, a refusé toute mission d'observation internationale du scrutin. «Aujourd'hui, tout le monde est là pour réagir», pour «une réaction forte du peuple face à la grave situation que nous vivons», confiait William Carrasco, 55 ans, patientant devant un bureau de vote de Chacao, quartier de l'est de Caracas. «Même le dentifrice est dur à trouver!». Tous les vendredis, il va d'un supermarché à l'autre, à la recherche de produits aussi basiques que du riz ou du papier toilette. Près de là, Filros Guzman, employée de restauration rapide de 24 ans, résumait le sentiment d'une partie de la population. Elle votait auparavant pour le parti du président, le PSUV: «J'aimais son idéologie: le socialisme, une société égalitaire, sans exploitation». «Maintenant ce qui m'occupe, ce sont les thèmes de la vie quotidienne. On ne peut pas voter pour le gouvernement quand on a du mal à survivre».
«Une journée longue et historique»
Malgré une campagne combative, PSUV n'a pas réussi à entamer la popularité de la Table de l'unité démocratique (MUD), coalition créditée de 14 à 35 points d'avance dans les sondages. Autrefois l'un des pays les plus fortunés d'Amérique latine, le Venezuela a vu son économie s'effondrer au même rythme que les cours du pétrole, qui est presque son unique richesse. L'inflation dépasse les 200%, selon les économistes, et l'insécurité est alarmante, avec le deuxième taux d'homicides le plus élevé au monde après le Honduras. Si la popularité de M. Maduro a fondu à 22%, selon l'institut Datanalisis, le chavisme (du nom de l'ex-président Hugo Chavez, décédé en 2013) a encore ses partisans parmi les classes populaires. «La révolution bolivarienne a démocratisé le pouvoir du peuple pour accéder aux biens et aux services», assurait jeudi Maria Rosa Jimenez, 34 ans, saluant les «programmes sociaux», socle du gouvernement.
Euphorique, l'opposition croit dans ses chances de remporter la majorité parlementaire, pour la première fois en 16 ans. Cela va être «une journée longue et historique», s'est exclamé sur Twitter l'ex-candidat à la présidentielle Henrique Capriles. Mais cette coalition disparate d'une trentaine de partis de la gauche à la droite dure ne repose que sur son rejet du chavisme et ne propose aucune solution concrète à la crise, tiraillée entre les modérés, menés par M. Capriles, et les radicaux de Leopoldo Lopez. Le président peut limiter les pouvoirs du Parlement, si celui-ci change de majorité, au risque d'entraîner de fortes protestations. Malgré le triomphe annoncé de l'opposition, «un grand changement de politique est improbable», résume Edward Glossop, analyste de Capital Economics.
(L'essentiel/AFP)