Vidéo chocNajiba, 22 ans, exécutée face caméra
La vidéo d'une femme, récemment exécutée en Afghanistan, fait polémique et relance le débat sur la condition des femmes dans le pays. Le gouvernement a dénoncé un acte «anti-islamique et inhumain».

Najiba, 22 ans, a été exécutée car elle était soupçonnée d'adultère.
Une vidéo montrant l'exécution par balle d'une femme soupçonnée d'adultère dans un village, à une centaine de kilomètres de Kaboul, relance une nouvelle fois la polémique sur les avancées de la condition féminine en Afghanistan après dix années de présence internationale.
La publication de cette vidéo intervient quelques heures après une importante réunion internationale, à Tokyo, des bailleurs de fonds de l'Afghanistan, qui ont pressé les autorités afghanes d'améliorer les droits de la femme en échange de l'octroi d'une aide de 16 milliards de dollars d'ici 2015.
Les images de la vidéo sont évidemment horribles. Dans un petit village de la province de Parwan, qui touche celle de Kaboul, plusieurs dizaines d'hommes, assis par terre ou regroupés sur des toits de maisons à flanc de montagne, fixent la silhouette d'une femme recouverte d'un voile grisâtre, qui leur tourne le dos.
Sans bouger
L'accusée, assise sur ses talons, écoute son arrêt de mort, sans bouger ni chercher à s'enfuir. Tout juste se permet-elle de tourner fugitivement la tête en début de séquence. «Cette femme, fille de Sar Gul, sœur de Mostafa et épouse de Juma Khan, s'est enfuie avec Zemarai. Elle n'a pas été vue dans le village pendant environ un mois», énonce son vraisemblable juge, un homme portant une longue barbe noire, après avoir cité quelques versets du Coran condamnant l'adultère.
«Mais heureusement, les moudjahidines l'ont attrapée. Nous ne pouvons lui pardonner», poursuit le juge taliban. «Dieu nous dit d'en terminer avec elle. Juma Khan, son mari, a le droit de la tuer». Une Kalachnikov est alors tendue à un homme vêtu de blanc qui se poste deux mètres derrière l'accusée.
Cadavre criblé de balles
Aux cris d'«Allah akbar» (Dieu est grand), celui-ci tire deux premiers coups en direction de la femme qu'il manque. Une troisième balle la touche à la tête. La victime s'écroule. Ce qui n'empêche pas son bourreau de faire feu à encore dix reprises sur son cadavre.
Dans la foule, uniquement composée d'hommes, certains enregistrent la scène sur leurs téléphones portables. D'autres demandent au tueur d'arrêter de s'acharner. D'autres ont le sourire aux lèvres. Des «Longue vie à l'islam» et autres «Longue vie aux moudjahidines» résonnent.
Décision en «moins d'une heure»
La version officielle est substantiellement différente. D'après Roshna Khalid, une porte-parole de la province de Parwan, Najiba, 22 ans, a été arrêtée par les talibans pour avoir eu des «relations» (extra-conjugales) avec un commandant taliban du district de Shiwari, dans la province de Parwan.
«Il y a seize jours», les insurgés ont décidé «en moins d'une heure qu'elle était coupable et l'ont condamnée à mort. Ils l'ont abattue devant les habitants de son village», a raconté la porte-parole. La police et l'armée, mobilisées ailleurs, n'ont pu intervenir, selon elle. Les forces de sécurité préparent toutefois «une grande opération» dans le district «pour retrouver les coupables», a averti Roshna Khalid.
Un acte «anti-islamique et inhumain»
Le ministère afghan de l'Intérieur a «fortement condamné» un acte «anti-islamique et inhumain» commis par «des tueurs professionnels». Des crimes odieux perpétrés contre des femmes sont rapportés chaque mois en Afghanistan, surtout dans les campagnes régies par les traditions. Selon l'ONG Oxfam, 87% des Afghanes affirment avoir subi des violences physiques, sexuelles ou psychologiques ou un mariage forcé.
Dans les grandes villes, où l'influence de la coalition de l'OTAN, présente depuis fin 2001, est sensible, des progrès sont palpables. Mais ils ne sont pas assez massifs, notamment en raison de la duplicité du gouvernement qui épouse la cause des femmes pour «continuer à recevoir» de l'aide internationale mais écoute «en pratique» «les demandes des éléments extrémistes», dénonce la société civile.
(L'essentiel Online/AFP)