Projet spatialQue pensent les experts du plan luxembourgeois?
LUXEMBOURG - Le Grand-Duché est le deuxième pays, derrière les États-Unis, à miser sur l’exploitation des ressources spatiales. Cela en vaut-il vraiment la peine?

Début février, le ministre de l’Économie, Étienne Schneider, présentait un projet étonnant. Faire du Luxembourg le 2e pays, après les États-Unis, à proposer un cadre légal aux entreprises qui souhaitent exploiter les ressources minières présentes dans l’espace. Grâce au projet «SpaceResources.lu», le Grand-Duché espère attirer des investisseurs, des experts et leur savoir-faire. L’envie d’un petit pays de partir à la conquête de l’espace a surpris la presse mondiale.
Est-ce réellement possible de trouver de l’or, du platine ou tout autre minerai précieux sur un astéroïde à des milliers de kilomètres de la Terre avant de le ramener sur notre planète? N’est-ce pas de la pure science-fiction? «C'est avant tout de la science et non de la fiction. Toutes les étapes nécessaires à la réalisation de ce projet ont déjà été éprouvées», souligne Markus Prayer. Le porte-parole de SES, un des opérateurs mondiaux de satellites basé au Luxembourg, nuance quand même et qualifie le projet de «vision». «Mais si votre vision est le fruit d'une ambition, vous devez vous y engager sérieusement», poursuit Markus Prayer.
Le «goût du risque»
Une comparaison parallèle est possible avec l’activité de base de SES. «Quand nous avons émis l’idée d’envoyer des satellites dans l’espace pour permettre aux chaînes de télévision de diffuser leurs programmes, tout le monde nous a pris pour des fous. Le Luxembourg n’a pas manqué de saisir cette bonne occasion et aujourd’hui, le marché pèse des milliards de dollars».
L'extraction des minéraux dans l'espace est également un projet qui promet un marché juteux, mais avant le coût de l'investissement est estimé à plusieurs milliards d'euros. Detlef Koschny, cadre de l'Agence spatiale européenne (ASE), contacté par L'essentiel rapporte que l'ASE a déjà tenté de s'engager sur cette voie. «Pour ramener 100 grammes de minéraux, soit une tasse de café, nous aurions bénéficié d'un budget d'un demi-milliard d'euros qui s'est révélé insuffisant. Donc nous avons décidé d'envoyer une sonde sur Jupiter». Mais le projet n'est pas que de la pure science-fiction: «En étant très optimiste, et en bénéficiant de budgets quasi illimités, je pense que c'est faisable dans 30 ou 40 ans. L'ASE qui est une structure publique ne peut pas se permettre cette démarche». Et le scientifique de saluer l'initiative du Luxembourg. «Il est clair que c'est un investissement d'avenir, sinon aucune entreprise privée ne s'y risquerait. Nous avons toujours besoin d'investisseurs qui ont le goût du défi». Un risque à prendre... sur le long terme.
(Philip Weber/L'essentiel)