Faute de main-d'œuvreRoumanie et Hongrie recrutent jusqu'en Asie
Confrontées à une pénurie croissante de main-d'œuvre qui menace de gripper son économie, la Roumanie et la Hongrie déroulent le tapis rouge aux travailleurs asiatiques.

A Vietnamese man works on a construction site in Bucharest, September 26, 2019. - Faced with a growing labour shortage, which threatens their economies, Romania and Hungary alike are courting Asian workers, belying Hungarian nationalist Prime Minister Viktor Orban's anti-immigration rhetoric. (Photo by Adrian Catu / AFP)
Casque jaune vissé sur la tête, une trentaine d'hommes s'affairent sur un chantier au sud de Bucarest, échangeant quelques mots en vietnamien: confrontée à une pénurie croissante de main-d'œuvre qui menace de gripper son économie, la Roumanie déroule le tapis rouge aux travailleurs asiatiques. «My friend, my friend», lance Costel, un ouvrier roumain à un «ami» vietnamien, dans un effort de briser la barrière linguistique sur ce chantier géré par la mairie du IVe arrondissement.
En dehors du travail, les moments d'échange entre les deux groupes sont limités: à la pause cigarette, les Asiatiques plébiscitent un calumet improvisé à partir d'un tuyau en PVC ; au déjeuner, ils partagent dans une salle à manger un repas consistant de plusieurs plats préparés par un chef vietnamien. «Nous avions de l'argent pour rénover des dizaines de HLM mais pas la main-d’œuvre nécessaire», explique à l'AFP le maire Daniel Baluta qui a décidé de recruter loin des frontières européennes. Terres d'émigration et de faible natalité, tous les pays du flanc est du continent sont confrontés à la même carence de main-d’œuvre.
Viktor Orban communique peu sur le sujet
La Hongrie voisine prévoit d'accorder 75 000 permis de travail en 2019 à des travailleurs hors Union européenne, soit trois fois plus qu'en 2017. La majorité d'entre eux continue de venir d'Ukraine mais ils sont de plus en plus nombreux à être originaires du Vietnam, de Chine, d'Inde, de Mongolie. Le gouvernement du Premier ministre nationaliste Viktor Orban, communique peu sur ce sujet alors que le refus de l'immigration constitue le fil rouge de sa politique depuis 2010. Désertée par environ quatre millions de ses habitants, eux-mêmes travailleurs émigrés dans des pays occidentaux aux emplois mieux rémunérés, la Roumanie a délivré plus de 11 000 permis de travail au cours du premier semestre 2019, contre 10 500 pour l'ensemble de 2018. Les Vietnamiens, les Moldaves et les Sri-Lankais en ont été les premiers bénéficiaires.
La plupart de ces embauches passent par des sociétés de recrutement, spécialisées dans la main-d’œuvre asiatique, dont le nombre a explosé. «Au début nous étions sollicités pour de projets de taille modeste mais depuis trois ans, la demande de travailleurs pour de grands projets a fortement progressé», indique à l'AFP Corina Constantin, directrice de la société roumaine Multi Professional Solutions. Selon une récente étude de la société américaine de travail temporaire Manpower, quatre employeurs roumains sur cinq rencontrent des difficultés à pourvoir des postes. En Hongrie, le manque de bras dans le seul secteur de l'industrie est estimé entre 40 000 et 50 000 personnes. «Il est impossible de mener des projets d'envergure sans travailleurs étrangers», explique Eva Toth, du syndicat hongrois de l'industrie chimique.
Pour la construction d'une usine de polyols à Tiszaujvaros, dans l'est de la Hongrie, l'un des plus gros chantiers industriels du moment, MOL, la principale entreprise pétrolière et gazière hongroise, prévoit d'employer 2 500 travailleurs étrangers, soit 25% de l'effectif, au plus fort de l'activité.
(L'essentiel/afp)