Luxembourg : Quelles mesures décidées lors de la tripartite vont vous profiter?

«Il n’y a pas eu d’adaptation du barème d’imposition à l’inflation depuis des années. Or, c’est la classe moyenne la grande perdante», a admis vendredi le Premier ministre Xavier Bettel, en présentant l'accord de principe à l’issue de la tripartite.

Les syndicats, eux, se réjouissaient d'avoir décroché ce qu'ils étaient venus chercher (ou presque): l'ajustement de ce barème. «Une vraie réussite et un gain net de pouvoir d'achat», selon Romain Wolff et la CGFP. Nora Back, présidente de l'OGBL évoquait «un très bon accord» avec «un pas symboliquement important» sur le barème parmi d'autres mesures: «la poursuite des mesures sur les prix de l'énergie en 2024 et les garanties obtenues sur les indexations de 2024. Nous nous attendions à une guerre sur les index dès janvier 2024», poursuivait-elle.

Toutefois les syndicats peinaient encore à livrer ce week-end des exemples précis de l'impact de l'ajustement du barème sur les revenus de chacun. Pour faire simple, l'accord de principe prévoit que le barème d'imposition soit ajusté à partir de 2024, et compensé d'ici là par un crédit d'impôt.

L'adaptation correspondra à deux tranches et demie d’indexation des salaires (+6,37%) contre huit espérées par les syndicats, soit les six précédentes et les deux attendues cette année (+21,8%). «Il y a quelques jours, nous n’avions rien. Là, nous avons deux tranches et demie. La tripartite est toujours un compromis», philosophe Patrick Dury, président du LCGB.

À ce jour, l'imposition sur le revenu se fait en 23 tranches (de moins de 11 265 euros à plus de 200 004 euros annuels) avec un taux d'imposition croissant de 0% à 42%. En clair, tous les seuils des tranches devraient donc augmenter en 2024 de 6,37%.

«Cela signifie davantage de revenu net pour un même revenu brut», résume Jean-Paul Olinger de l'Union des entreprises luxembourgeoises (UEL). Une personne (classe 1) au revenu imposable ajusté de 30 000 euros annuels (2500 par mois) se voyait jusqu'ici appliquer un taux d'imposition à 22%, valable pour la tranche de 28 401 à 30 345 euros. L'an prochain, elle sera imposée à 20 % étant dans la tranche inférieure de la nouvelle grille (située de 28 142 à 30 210 euros).

Pour 2023, il était impossible de mettre déjà en place l'ajustement à deux tranches et demie. Les participants à la tripartite se sont mis d'accord pour compenser avec un crédit d'impôt de conjoncture. Il sera calculé par l'administration des contributions directes pour chaque contribuable afin de simuler une adaptation du barème de l'équivalent de deux tranches indiciaires (+5%). Une mesure rétroactive à compter de janvier 2023. Mais le moment où le crédit d'impôt interviendra n'est pas encore clair. Le texte devrait être prêt d'ici mardi.

L'OGBL souligne que les contribuables ne devraient pas être perdants par rapport au crédit d'impôt énergie (jusqu'à 84 euros puis dégressif jusqu'à un revenu de 100 000 euros annuels) qui compensait une tranche indiciaire mais aussi de la hausse de la taxe C02. Le crédit d'impôt de conjoncture s'ajoutera, au contraire, aux indexations. Et une compensation spécifique, liée à la hausse de la taxe CO2, est prévue pour les bas salaires.

«Jusqu’à présent, nous n’avions pas pu adapter le barème, car nous avions pris d’autres mesures coûteuses», justifie Yuriko Backes, ministre des Finances. Aujourd’hui, la situation serait «différente, avec un peu de croissance et l’inflation la plus basse d’Europe».

Mais Xavier Bettel refuse de rendre l’adaptation automatique à chaque index: «Ce ne serait pas raisonnable de prendre des mesures engageant le prochain gouvernement». Mais il ne se fait pas d’illusion sur la suite: «Je connais les syndicats. Sitôt le gouvernement formé, ils demanderont à le voir pour discuter de ce point!», sourit-il.